Histoire
Si le canal fonctionne, il n’est pas totalement achevé. Il se révèle difficile à parcourir, avec ses multiples écluses et son souterrain. De ce fait, il devient pour les ingénieurs un lieu d’expérimentations, véritable laboratoire technique, visant à rendre la circulation plus facile.
Améliorations
Quatre maisons éclusières sont construites sur le versant Saône en 184310, ainsi que les maisons de garde sur tout le linéaire. Mais l’essentiel est dans l’achèvement des cinq réservoirs du point de partage. A partir de 1835, l’alimentation en eau est notablement améliorée avec l’utilisation des réservoirs de Cercey, Panthier et Tillot. Les travaux sur le canal se poursuivent avec la construction de ceux de Grosbois et de Chazilly.
De constantes améliorations11 sont apportées au système hydraulique, notamment grâce à l’ingénieur Bazin12 : nouvelles prises d’eau, nouveaux déversoirs, agrandissement des réservoirs, etc.
Un manuscrit du conducteur des Ponts et Chaussées Legros établit un point précis sur le canal de Bourgogne en 186013. Il recense alors 15 ports principaux et 15 moins importants, 143 ponts dont 55 en bois, 82 aqueducs, 34 prises d’eau et 22 déchargeoirs, 224 maisons et 11 480 bornes diverses !
On reprend les points critiques de l’alimentation en eau : une centrale électrique est installée sur le bief de partage, une pompe à Saint-Jean-de-Losne14 en 1897.
La seconde moitié du 19e siècle voit la réalisation d’un gros chantier : la création du réservoir de Pont-et-Massène et, concomitamment, l’allongement des sas d’écluse, entre 1878 et 1882, à la suite de la loi dite Freycinet. Ces travaux sont effectués pendant quatre campagnes en interrompant le trafic seulement deux mois chaque été. Dans le même temps, les tranchées sont élargies15.
Entretien du linéaire
Une fois la construction terminée, l’entretien de la voie d’eau fait l’objet d’une surveillance constante, en particulier l’étanchéité de la cuvette.
Les archives témoignent de manière récurrente dans les années 1830-1840 de versement d’indemnités aux riverains pour des eaux qui s’infiltrent dans leurs terrains, avec pour conséquence une dépréciation desdits terrains, des récoltes16, etc. Plusieurs procédés d’étanchement sont proposés au fil des années : dès le début du 20e siècle, par exemple, les ingénieurs réfléchissent à l’utilisation du béton17.
Pour enlever les dépôts de vase dans les biefs, une décision ministérielle du 6 janvier 1852 impose la construction d’un bateau-dragueur. En 1853 un radeau-dragueur est alors proposé par Tarbé de Saint-Hardouin dans le département de l’Yonne18.
Les ingénieurs tentent d’améliorer le parcours en recoupant les courbes. En 1890, par exemple, 32 courbes sont ainsi supprimées sur la commune de Charigny, entre les écluses 13 et 31 du versant Yonne19.
Halage et touage : projets et réalisations
Des expérimentations ont lieu pour faciliter le passage délicat du tunnel de Pouilly et pour améliorer la traction des bateaux sur le chemin de halage.
Le décret du 28 avril 1866 autorise la création aux frais de l’Etat d’un service de touage à vapeur au niveau du bief de partage. Il commence à fonctionner le 5 février 186720. Après de nombreux accidents, dont un mortel, il est remplacé par le touage électrique en 189221.
Par ailleurs, un décret du 18 janvier 1873 concède à M. Larmanjat l’établissement de la ligne du canal de Bourgogne : une voie ferrée le long de la voie d’eau pour le halage des bateaux au moyen de machines à vapeur. Des tests sont effectués les 23 et 24 juillet 1873. En 1877, la Société de halage à vapeur demande l’autorisation de placer un rail directeur au-dessus du souterrain. Aujourd’hui, ne subsiste plus aucune trace de ce système de halage. Par contre, un des toueurs est présenté dans une ancienne cale sur le port de Pouilly-en-Auxois. La halle moderne qui le protège est une œuvre de Shigeru Ban.
Lieu de développement industriel
Traversant des zones propices, le canal induit le développement d’une importante industrie autour de la pierre : carrières, usines de taille, usine de chaux et de ciment.
Intérêt stratégique
Voie de communication importante, le canal a pu, en situation de conflits, constituer un ouvrage stratégique. Ainsi, en novembre 1870, les écluses 93 et 112 du versant Yonne sont détruites sur ordre des autorités militaires françaises, pour empêcher les Prussiens d’utiliser cette partie. Les bajoyers et les vantaux des portes d’écluse sont reconstruits à partir de 187122. En juillet 1944, les portes de l’écluse 39 du versant Saône sont démolies par la Résistance afin de désorganiser la circulation des nombreuses péniches utilisées par les Allemands23.
Le canal au 20e siècle
Cette voie d’eau paraît de plus en plus difficile à parcourir à mesure que d’autres réseaux plus accessibles se développent (rail et route). Parallèlement, les industries liées à la pierre, les plus nombreuses sur le canal, ont tendance à péricliter.
Ceci explique sans doute le déclin de la voie industrielle au 20e siècle, déclin qui bloque toute modernisation.
Dans les années 1965-1966, il est même envisagé de combler le canal entre Plombières et Dijon pour ménager un accès plus direct à l’autoroute A 38 (reliant l’A6 à Paris), mais ce projet n’a pas été réalisé.
De nos jours, le canal de Bourgogne joue un rôle identitaire fort pour la région et bénéficie d’un afflux touristique, avec l’installation de pistes cyclables sur le chemin de halage.