Maisons
© T. Kuntz, Service Patrimoine et inventaire, Région Bourgogne, 2011.
Un document de 18601 dénombre 215 maisons éclusières et de garde et neuf maisons de perception. Si les plus connues aujourd’hui restent les maisons des éclusiers, les maisons de garde et de perception n’en étaient pas moins importantes à l’époque. Les archives mentionnent aussi des habitations pour les ingénieurs du canal ou pour les contrôleurs.
Contrairement à celles d’autres canaux, les maisons du canal de Bourgogne ne présentent pas d’unité architecturale. Cette mosaïque s’explique par l’étalement de la construction sur plusieurs décennies et par une rupture forte : la Révolution. En effet, les projets de l’Ancien Régime ne sont pas forcément reconduits sous l’Empire. Par ailleurs, l’administration du canal étant entièrement refondue, une nouvelle hiérarchie d’ingénieurs s’impose et le financement est repensé. L’architecture seule ne permet cependant pas de bien les distinguer les unes des autres, seul un classement basé sur la morphologie est éclairant. Ainsi, moins de cinq types de maisons portent le nom de l’ingénieur qui en a fourni le plan.
Essai de chronologie
Une première vague de construction à la fin du 18e siècle
La construction des maisons éclusières s’effectue en même temps que les travaux sur les sites d’écluses. Les premières maisons de type Forey s’implantent entre Dijon et Saint-Jean-de-Losne, sur le versant Saône, dès les années 1780. Quelques-unes, des maisons de type Montfeu, sont également en chantier sur le versant Yonne, entre Migennes et Saint-Florentin, vers 1790.
De nouveaux modèles proposés et construits à partir de 1811
Lorsque les travaux reprennent, après 1811, le modèle Foucherot est largement utilisé sur le versant Saône, en particulier vers 1820. D’autres types sont mis au point sur le versant Yonne à la même période (modèles Poirée et Robillard), mais ils restent circonscrits à la partie entre Saint-Florentin et Tonnerre, n’approchant pas la diffusion du modèle Foucherot. En 1836, un deuxième rapport de l’ingénieur Bonnetat2 précise que 173 maisons éclusières sont construites, quelques-unes servant pour deux écluses à la fois.
Un devis général pour les travaux du canal de Bourgogne, rédigé par Bonnetat en 18263, établit une prescription des matériaux de construction à utiliser pour les maisons :
- Moellon de parement et pierre de taille.
- Briques pour four et souche de cheminée.
- Tuiles plates.
- Chêne pour charpente, râtelier et mangeoire d’écurie, portes extérieures et croisées. Sapin pour plancher et portes intérieures.
- Portes, croisées et volets, main courantes des escaliers, peints à l’huile en couleur gris de perle ou vert foncé.
Des maisons supplémentaires pour de nouvelles fonctions après 1820
La plupart des maisons de garde sont bâties après l’ouverture du canal à la navigation. Ainsi, en 1841, les travaux de construction de six maisons « destinées au logement des gardes du canal de Bourgogne » sont adjugés à Joseph Moreau d’Ancy-le-Franc4.
Il en va de même des sept maisons de perception. Dans l’Yonne, par exemple, celles de Cheny à Migennes5, de Ravières et de Tonnerre sont construites dans les années 1820, d’après les plans de l’ingénieur Robillard6.
Peu de changements entre 1860 et aujourd’hui
La période contemporaine n’a que peu modifié l’état du 19e siècle. Les maisons sont pour la plupart toujours debout. Certaines ont été reconstruites, en respectant globalement le parti d’origine, à Tonnerre par exemple. Elles appartiennent toujours, en majorité, au domaine public du canal. Toutefois, au fil du temps et selon les besoins des occupants, ajouts ou modifications sont venus perturber le parti d’origine, que l’on devine masqué par les annexes et les enduits modernes.
Typologie
Les maisons éclusières et de garde
Inventaire par type
- 222 maisons dont :
- 141 de type Foucherot
- 41 de type Forey
- 15 de type Poirée
- 10 de type Robillard
- 2 de type Montfeu
- et 7 atypiques
Inventaire par fonction
- 188 maisons éclusières
- 26 maisons de garde recensées dont :
- 20 de type Foucherot
- 2 de type Poirée
- et 1 de type Robillard
- 8 sites d’écluse comprennent une maison de garde
- 5 sont dans les ports
- 6 le long d’un bief
- 6 près des réservoirs
- 1 sur une rigole
Si le modèle proposé par Jacques Foucherot domine nettement le linéaire, il n’est pas le plus connu. L’image traditionnelle attachée au canal reste celle de la maison Forey, modèle appliqué pour les premières réalisations sur la partie qui va de Saint-Jean-de-Losne à Dijon, en chantier dans les années 1780.
Les maisons de perception
Sur les sept maisons de perception recensées, quatre en Côte-d’Or sont bâties selon le même modèle, à Dijon, Pont-de-Pany (Sainte-Marie-sur-Ouche), Pont-Royal (Clamerey) et Montbard. Leur construction débute à partir de 1835 et elles sont achevées en 1838 avec un niveau supplémentaire par rapport au projet d’origine7.
- plan rectangulaire
- moellons enduits, flanquées de chaînes d'angles en pierre de taille
- toit à longs pans en tuiles plates.
- rez-de-chaussée sur soubassement, deux étages et un grenier.
Maisons atypiques combinant plusieurs fonctions
Les maisons éclusières situées près des ports ou des points stratégiques du canal, d’un point de vue géographique, historique ou économique, combinent plusieurs fonctions (logement du garde et / ou de perception) et adoptent en conséquence un parti plus développé que celles construites pour les écluses du parcours.
Quelques exemples :
- écluse 76 du versant Saône (la dernière écluse de ce versant au port de Saint-Jean-de-Losne) ;
- écluse 55 du versant Saône (au port de Dijon) ;
- écluse 114-115 (la dernière du versant Yonne au port de Migennes) ;
- écluse 50 du versant Saône (port de Plombières-lès-Dijon) : maison de petit gabarit qui se rapproche de celles construites d’après Robillard dans l’Yonne.
A Pouilly se trouve encore à la sortie du tunnel, du côté du versant Yonne et sur la rive droite, un ensemble de logements construit autour de deux cours rectangulaires, avec des jardins attenants sur la droite. Il s’agit d’anciens bâtiments du canal, mentionnés dans les archives comme « maisons des gardes et du contrôleur des travaux ». Une partie était réservée aux logements des gardes tandis qu’une autre abritait les bureaux et logements des ingénieurs en charge des travaux et de l’entretien du canal.