Un petit cercle, en bordure de rivière, entouré de hachures à la plume attire l’attention du curieux penché sur les cartes de la Seille de la fin du 18e siècle et du 19e siècle. L’examen des autres plans rend perplexe : de nouveaux cercles cernés de hachures apparaissent au fil de l’eau. Un plan de Branges vend la mèche : ce sont des mottes !
Les mottes

© J.-L. Duthu, Service Patrimoine et inventaire, Région Bourgogne, 2010
Si le terme de motte désigne fréquemment une butte de terre artificielle sur laquelle étaient installées des structures défensives au Haut Moyen Âge, celles que nous trouvons au long de la Seille nous permettent de nuancer et de préciser cette définition, au regard des dernières études. En effet, sous ce terme générique de « motte » sont réunis des vestiges archéologiques qui ne sont pas toujours défensifs, ni même médiévaux.
Douze ont été repérées sur le cours de la Seille dont trois à Loisy1, une à Huilly (Molaise), une (ou deux selon les plans) à Pont-Seilles, une à Branges. Ces mottes sont parfois indiquées comme telles sur les cartes anciennes. Elles peuvent aussi apparaître dans la toponymie, avec des lieux-dits tels « motte de Couy », « bois de la Motte » ou « motte Girard », sur un plan du linéaire de la Seille de 18592. L'une d'elles était située à Pont-Seille, rive droite, en limite de communes de Ratenelle et La Truchère, sur un point ancien point de franchissement de la rivière. Les mottes ne se distinguent plus dans le paysage car elles ont presque totalement été arasées.

© J.-L. Duthu, Service Patrimoine et inventaire, Région Bourgogne, 2010
Plusieurs explications ont été évoquées à leur sujet au cours de l’histoire. Certains historiens pensaient qu’il pouvait s’agir de bastions de défense. Au 19e siècle, deux d’entre elles sur la commune de Sermoyer3 étaient interprétées comme des tumuli (tombes). Elles ont été détruites lors la construction du pont en 1849.
Aujourd’hui, plusieurs hypothèses sont évoquées par les archéologues. A Molaise (Huilly-sur-Seille, Loisy), les fouilles restituent une terrasse de 28 à 30 mètres de diamètre supposé, entourée de deux fossés concentriques larges de 12 et 20 mètres. Une construction, ou plusieurs, étaient vraisemblablement érigées dessus. Il s’agissait probablement d’un îlot naturel, isolé par deux chenaux de la rivière, ce qui permettait à la fois de la contrôler et de défendre les lieux.
Des études récentes (palynologie, microtopographie, géomorphologie) permettent, en l’absence de tout autre vestige, de connaître l’environnement paysager des lieux grâce à des échantillons de terre prélevés dans les fossés. Leurs analyses nous apprennent, à partir d’un exemple bien étudié, qu’au début du remplissage du fossé - correspondant à la fin de l’utilisation de la motte -, l’environnement était à dominante agricole et pastorale. Il devient forestier, avec une prédominance du peuplier puis du chêne. Des datations au carbone 144 indiquent que les lieux ont été occupés de manière continue au moins de l’antiquité (50 av J.C) à la fin du 13e siècle ou au début du 14e.
Les spécialistes n’excluent pas une origine encore plus ancienne, à relier à des terrassements de l’âge du fer observés ailleurs en Bresse.