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Aux sources des canaux de Bourgogne, les archives

Nous avons décidé de mettre en lumière des archives peu ou pas assez connues, conservées aux Archives nationales, aux Archives départementales ou dans les services de Voies Navigables de France (VNF) de Corbigny, Dijon, Montceau-les-Mines et Tonnerre.

Histoires d’archives

Dans le cadre d’une enquête d’inventaire général du patrimoine culturel, les archives nous aident à écrire l’histoire, mais dans une démarche différente des recherches historiques classiques. Elles sont surtout exploitées pour documenter un ensemble existant. Identifier, dater et classer chaque élément constituant le linéaire, toutes ces opérations relèvent d’une étude globale des fonds d’archives. Le silence de certaines sources apparaît alors d’autant plus évident que nous utilisons des bases de données rendant nos résultats homogènes et comparables. La construction de l’embranchement de Vermenton sur le canal du Nivernais, n’est par exemple pas documentée, alors qu’il existe beaucoup d’informations sur la rigole de l’Arroux rejoignant le canal du Centre.

La confrontation au réel permet de remettre les archives en perspective : les Archives départementales de la Côte-d’Or possèdent un ensemble de plans pour un modèle de maison éclusière dressé par Émiland-Marie Gauthey dans les années 1780 et signé par les États de Bourgogne. Ce modèle aurait dû être construit entre Dijon et Saint-Jean-de-Losne, mais la recherche sur le terrain prouve qu’il n’existe aucune maison de ce type.

Canal de Bourgogne : « Maison d'éclusier ». Élévation et coupes sur la largeur d'une maison éclusière. « Vu et approuvé par nous, Élus Généraux des États du Duché de Bourgogne, pour être exécuté suivant sa forme et teneur, fait en la chambre des Élus généraux à Dijon le 12 janvier 1784. » Dessin d’Émiland-Marie Gauthey (ingénieur), 10 janvier 1784. Archives départementales de la Côte-d’Or, C 4528, réutilisation soumise à conditions.
Canal de Bourgogne : « Maison d'éclusier ». Élévation et coupes sur la largeur d'une maison éclusière. « Vu et approuvé par nous, Élus Généraux des États du Duché de Bourgogne, pour être exécuté suivant sa forme et teneur, fait en la chambre des Élus généraux à Dijon le 12 janvier 1784. » Dessin d’Émiland-Marie Gauthey (ingénieur), 10 janvier 1784. Archives départementales de la Côte-d’Or, C 4528, réutilisation soumise à conditions.

Par ailleurs, l’histoire des canaux a conditionné l’organisation des archives, ce qui explique que la répartition des fonds soit différente selon les voies d’eau. Sous l’Ancien Régime, les débuts de la construction étaient suivis pour partie par les États de Bourgogne : le canal du Centre, une partie du canal de Bourgogne ainsi que la Seille canalisée sont de ce fait bien représentés parmi les fonds des Archives départementales de la Côte-d’Or. A partir des années 1820, les travaux les plus importants sont soumis à l’autorisation du Ministère des Travaux publics : ils sont dans les fonds très complets des Archives nationales. Le détail des travaux était quant à lui conservé dans les locaux des ingénieurs. L’ancienne maison des arquebusiers à Chalon-sur-Saône était utilisée comme local d’archives dans les années 1820. S’ils n’ont pas été déposés dans les Archives départementales, ces fonds restent aujourd’hui majoritairement dans les services de VNF.

Les documents d’archives ne fournissent pas seulement aux chercheurs de l’inventaire des données complémentaires à l’étude de terrain. Les canaux constituent un patrimoine technique en constante amélioration, dont l’évolution est encore mal connue et la lecture actuelle pas toujours évidente. Dans ces conditions, seules les archives permettent de reconstituer des états antérieurs disparus.

En fonction des différents fonds d’archives, nous avons constaté que trois types de source nous étaient indispensables. Nous avons donc exploité en priorité :

  • les rapports et courriers des ingénieurs des Ponts et Chaussées,
  • les sources iconographiques, comme les plans des ouvrages,
  • les plans de bornage des canaux.

Analyse des sources

Les rapports d’ingénieurs de la série F14 aux Archives nationales

La série F14 rassemble les fonds de l’ancien Ministère des Travaux publics. Nous y avons trouvé de nombreux projets d’ingénieurs, des rapports présentés au Conseil général des Ponts et Chaussées ou encore les courriers échangés entre le Ministère des Travaux publics et les préfectures. Ces derniers nous ont permis de dater la plupart des ouvrages des canaux bourguignons construits au 19e siècle, particulièrement ceux du canal du Nivernais (entre 1825 et 1840). Pour le canal du Centre, ancien canal du Charolais, dont le tracé et une partie des ouvrages sont fixés au 18e siècle, les Archives nationales conservent des éléments sur la plupart des ouvrages et des modifications réalisés après 1825. Le canal de Bourgogne y est bien documenté avec des dossiers sur les ouvrages (réservoirs) et les grands travaux (campagne d’exhaussement des ponts et d’allongement des écluses de la fin du 19e siècle).

Les fonds iconographiques des Archives départementales

Au regard de l’historiographie des canaux bourguignons, ces archives ont surtout été utilisées à des fins illustratives. Un certain nombre de dessins d’ingénieurs concernant les maisons éclusières et les ouvrages d’art principaux constituent des documents précieux pour appréhender les étapes de construction de cette architecture en série. Les Archives départementales de la Côte-d’Or conservent aussi des documents de la fin du 18e siècle, comme des projets de canaux ratifiés par les États de Bourgogne. Les Archives départementales de Saône-et-Loire possèdent également un plan aquarellé du canal du Centre, dressé par Émiland-Marie Gauthey, et l’ensemble des carnets d’ateliers de la construction. Aux Archives départementales de la Nièvre se trouve un passionnant rapport de 1790, rédigé par l’ingénieur Amable Hageau. Illustré de magnifiques aquarelles, il nous dresse un état des lieux précis du canal du Nivernais à la fin de l’Ancien Régime, canal se réduisant alors à la portion Châtillon-en-Bazois / Lachaise.

Les plans de bornage des services de VNF : des sources inédites

Dans ces archives, qui sont toujours utilisées pour l’exploitation des ouvrages, nous avons trouvé plusieurs plans de bornage dressés par les ingénieurs des canaux. Les subdivisions de Dijon et de Tonnerre conservent un exemplaire de ceux du canal de Bourgogne. Dessiné à la plume et à l’aquarelle, il date certainement du milieu du 19e siècle. Il présente un état des lieux inestimable de cette voie d’eau et de ses abords à cette époque. A Corbigny, le plan de bornage du canal du Nivernais, levé en 1930, est tout aussi important pour recenser et dater les ouvrages anciens. En revanche, pour le canal du Centre, seule une partie des plans est conservée à Montceau-les-Mines. Dressés au milieu du 19e siècle, ils présentent commune par commune le domaine public fluvial, et sont calés sur les minutes cadastrales.

Canal du Nivernais : « Carte topographique des différents étangs destinés à former le réservoir du point de partage du Canal du Nivernais », plan aquarellé, 127x103 cm,
VNF-direction territoriale Centre Bourgogne, subdivision de Corbigny
Canal du Nivernais : « Carte topographique des différents étangs destinés à former le réservoir du point de partage du Canal du Nivernais », plan aquarellé, 127x103 cm,
VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne, subdivision de Corbigny
Canal du Nivernais : Détail de l’étang de Baye avec les bâtiments de l’administration du canal sur la « Carte topographique des différents étangs destinés à former le réservoir du point de partage du Canal du Nivernais », plan aquarellé, 127x103 cm, VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne, subdivision de Corbigny
Canal du Nivernais : Détail de l’étang de Baye avec les bâtiments de l’administration du canal sur la « Carte topographique des différents étangs destinés à former le réservoir du point de partage du Canal du Nivernais », plan aquarellé, 127x103 cm, VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne, subdivision de Corbigny

Nous avons pu découvrir quelques « pépites », comme des plans aquarellés de la Seille navigable levés à la fin du 18e siècle1 ou du bief de partage du canal du Nivernais daté de 18072. Il s’agit d’un état certainement projeté au début du 19e siècle. Les travaux de construction de ce canal, débutés sous l’Ancien Régime puis arrêtés par la Révolution française, reprenaient tout juste sous l’Empire : le site d’écluse de Baye avec la maison éclusière et le pavillon des ingénieurs sont déjà présents.

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Retour au texte 1 Ils sont conservés à Montceau-les-Mines.
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