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Généralités

1. Organisation d’ensemble d’un canal

Qu’est-ce qu’un canal ? Définitions

Le canal est une voie d’eau artificielle destinée à faciliter le passage des bateaux. On parle de rivière aménagée ou canalisée quand l’essentiel de la navigation peut se faire en lit de rivière, avec généralement des biefs de dérivation portant les écluses : c’est le cas de la Seille et de certaines parties du canal du Nivernais. Un système de barrages permet de maintenir un niveau d’eau suffisant. Ce type d’aménagement se répand à partir du 17e siècle pour éviter les endroits difficiles. Le creusement d’un canal latéral, qui suit le cours d’une rivière, permet d’éviter tout obstacle à la navigation. Après avoir été doté de pertuis dès le début du 18e siècle, le Loing2 est l'une des premières rivières associées à un canal latéral. Cette innovation qui combine barrages, râcles et portes de garde sera reprise sur le canal du Nivernais.

Schéma du fonctionnement d’une rivière aménagée ou canalisée.
Schéma du fonctionnement d’une rivière aménagée ou canalisée.
Seille canalisée : l’entrée du bief de dérivation portant l’écluse de Loisy. La Seille poursuit son cours pour alimenter le moulin de Loisy.
Seille canalisée : l’entrée du bief de dérivation portant l’écluse de Loisy. La Seille poursuit son cours pour alimenter le moulin de Loisy.
Schéma du fonctionnement d’un canal latéral à un cours d’eau.
Schéma du fonctionnement d’un canal latéral à un cours d’eau.

La voie d’eau artificielle sert aussi d’ « ascenseur » ou d’ « escalier » aux bateaux dans des parcours où aucune rivière ne peut les porter. Il s’agit alors d’un canal à point de partage ou de jonction, comme les canaux de Bourgogne, du Centre et du Nivernais. Le point de partage est précisément le point le plus haut de la voie d’eau, séparant deux bassins hydrologiques. Les premiers exemples sont mis au point dès le milieu du 17e siècle, pour le canal du Midi et celui de Briare. Ce dernier est doté d’une échelle d’écluses à Rogny-les-Sept-Écluses, dans l’Yonne.

Schéma de fonctionnement d’un canal à point de partage, dit aussi « de jonction ».
Schéma de fonctionnement d’un canal à point de partage, dit aussi « de jonction ».
Fonctionnement d’un canal à point de partage, dit aussi « de jonction » : vue en coupe.
Fonctionnement d’un canal à point de partage, dit aussi « de jonction » : vue en coupe.
Canal du Centre : le bief de partage. La digue appelée « Allée des Soupirs » sépare l’étang de Longpendu du linéaire du canal.
© T. Kuntz, Service Patrimoine et inventaire, Région Bourgogne, 2012.

Les canaux bourguignons ont la particularité de combiner les deux systèmes. Ce sont tous les trois des canaux à bief de partage alimentés par des étangs-réservoirs au moyen de rigoles. Mais leur longueur les oblige aussi à se comporter comme des canaux latéraux, c’est-à-dire à recevoir une alimentation par prise d’eau dans la rivière la plus proche ou d’être en dérivation de son lit. Des déversoirs3 évacuent le trop-plein de l’ouvrage dans la rivière.

Canal de Bourgogne : système d’alimentation par prise d’eau dans l’Armançon. Une rigole déverse l’eau dans un bassin contigu au canal.
Canal de Bourgogne : système d’alimentation par prise d’eau dans l’Armançon. Une rigole déverse l’eau dans un bassin contigu au canal.
Canal de Bourgogne : Sortie du déversoir dans le bief 75 du versant Yonne.
Canal de Bourgogne : Sortie du déversoir dans le bief 75 du versant Yonne.
Canal de Bourgogne : déversoir sur le bief 52 du versant Saône à Dijon.
Canal de Bourgogne : déversoir sur le bief 52 du versant Saône à Dijon.

Quels ouvrages pour quels usages ?

Le canal est destiné en priorité à faire transiter des marchandises, dans un but de développement commercial et industriel du territoire. Les ingénieurs prévoient pour cela ports, quais, cales, etc.

Canal du Centre : le nouveau port de Lucy sur le bief 10 du versant Océan à Montceau-les-Mines et Cité de la Saule. Vers 1940. Négatif au gélatino-bromure d’argent sur verre. Coll. Combier - musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône -  inv. n° 1975.19.71306.282.1
Canal du Centre : le nouveau port de Lucy sur le bief 10 du versant Océan à Montceau-les-Mines et Cité de la Saule. Vers 1940. Négatif au gélatino-bromure d’argent sur verre. Coll. Combier - musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône - inv. n° 1975.19.71306.282.1
Canal du Centre : le port de Lucy sur le bief 10 du versant Océan à Montceau-les-Mines. Entrée du bassin des Chavannes, centrale électrique – vue aérienne. Vers 1950. Négatif au gélatino-bromure d’argent sur plastique. Coll. Combier - musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône -  inv. n° 1975.19.71306.93.1
Canal du Centre : le port de Lucy sur le bief 10 du versant Océan à Montceau-les-Mines. Entrée du bassin des Chavannes, centrale électrique – vue aérienne. Vers 1950. Négatif au gélatino-bromure d’argent sur plastique. Coll. Combier - musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône - inv. n° 1975.19.71306.93.1

L’eau qu’il monopolise peut également produire de l’électricité, pour faire tourner un moteur ou être utilisée en tant que telle (lavage, chimie). Les industriels demandent alors à bénéficier d’une prise d’eau ou d’un chenal. En cas de réponse favorable, ils bénéficient d’une convention d’occupation temporaire, ne leur garantissant aucun droit dans le temps pour les nouveaux usagers, à la différence de ce qui se passe avec les moulins qui, implantés avant les canaux, conservent un droit d’eau.

Canal de Bourgogne : entrée du chenal desservant l’ancienne usine d’Ancy-le-Franc, sur le bief 81 du versant Yonne.
Canal de Bourgogne : entrée du chenal desservant l’ancienne usine d’Ancy-le-Franc, sur le bief 81 du versant Yonne.

Le canal contribue aussi à la gestion du réseau hydrologique. Il existe un grand nombre d’ouvrages qui l’alimentent ou le vident, influant ainsi sur les cours d’eau associés. Il modifie le régime de la rivière en jouant souvent comme soutien d’étiage par les fuites et parfois, quand les retenues sont vides en fin de saison, comme tampon pour les petites crues et comme retardateur pour les grosses crues. Les ouvrages n’étant pas conçus pour cela, l’écrêtement des grosses crues n’est pas effectif, le sentiment de sécurité créé peut même entraîner une négligence du risque qui peut aggraver les dégâts.

Enfin, la pêche tout comme la gestion des alignements d’arbres impliquent des aménagements propres comme des viviers, des pépinières, etc. Ces équipements, attestés sur le canal de Bourgogne, par exemple, ont aujourd’hui disparu.

Les acteurs au 19e siècle : constructeurs et administrateurs

Canal du Centre : travaux dans le bief du canal du Centre à Saint-Bérain-sur-Dheune. 1er quart du 20e siècle. Négatif sur nitrate de cellulose.
Coll. musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône -  inv. n° 1975.19.7191.2
Canal du Centre : travaux dans le bief du canal du Centre à Saint-Bérain-sur-Dheune. 1er quart du 20e siècle. Négatif sur nitrate de cellulose.
Coll. musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône - inv. n° 1975.19.7191.2

Les canaux nécessitent une organisation technique rigoureuse et une surveillance permanente : l’eau est un souci constant. Inondations, pertes d’eau, fuites, envasements, la liste est infinie dans les archives ! Les ingénieurs des Ponts et Chaussées sont devenus experts dans ce domaine.

Toute une hiérarchie administrative se met en place au début du 19e siècle pour améliorer le passage des bateaux. Le conseil national des Ponts et Chaussées valide depuis Paris les grands travaux proposés par l'ingénieur en chef du canal concerné, basé localement. Les plans de détail sont souvent dressés par les ingénieurs ordinaires. En Bourgogne, chaque canal est ainsi géré par une administration propre située à Chalon-sur-Saône, Tonnerre, Corbigny... Leur lieu de résidence a évolué au fil du temps. Les ingénieurs ordinaires, assistés par des conducteurs des travaux, veillent à la bonne réalisation des projets et font remonter les besoins. Des maisons, spécialement construites pour eux, apparaissent dans les archives : maison du conducteur des travaux, maison des ingénieurs sur le canal du Nivernais, par exemple.

Canal du Centre : bâtiment de la subdivision de VNF, remplaçant l’ancienne maison éclusière du bief 09 du versant Océan, à Montceau-les-Mines.
Canal du Centre : bâtiment de la subdivision de VNF, remplaçant l’ancienne maison éclusière du bief 09 du versant Océan, à Montceau-les-Mines.
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Retour au texte 1 GAUTHEY Émiland-Marie, « Septième mémoire sur l’établissement des canaux de navigation, septembre 1785 », in Mémoires sur les canaux de navigation, publié par Navier, 1817, p. 209.
Retour au texte 2 MAURET-CRIBELLIER Valérie, Entre fleuves et rivières, les canaux du centre de la France, Lyon : Éditions Lieux-Dits, 2008, p. 24. Le canal de dérivation du Loing est construit de 1719 à 1724.
Retour au texte 3 Mis au point sous le nom de déchargeoir par Hugues Cosnier sur le canal de Briare au début du 17e siècle. MAURET-CRIBELLIER Valérie, Entre fleuves et rivières, les canaux du centre de la France, Lyon : Éditions Lieux-Dits, 2008, p.33.
Retour au texte 4 Notice sur le canal de Bourgogne et le canal du Nivernais, p. 7.
Retour au texte 5 GRANGEZ Ernest, Traité de la perception des droits de navigation et de péage sur les fleuves, rivières et canaux navigables ou flottables en trains, appartenant à l’État ou concédés, Paris : Librairie scientifique-industrielle de L. Mathias (Augustin), 1840.